« Ma soif d’autonomie et mes forces sont revenues. »
Michelle Lochan était passionnée par l’idée de lancer sa propre entreprise, mais comme elle élevait seule ses cinq enfants, son parcours était parsemé d’embûches. Puis elle a obtenu l’aide dont elle avait besoin. Propos recueillis par Diane Hill pour le numéro Printemps 2014 du magazine Dit Elle.
Quand vous aidez une femme à lancer sa propre entreprise, cela a aussi des répercussions sur ses enfants. Ils veulent être aussi autonomes que leur mère et apprennent à croire en leurs propres décisions. Quand une femme accroît son autonomie financière, cela signifie qu’elle peut aussi quitter un mari violent plus facilement, car elle a un revenu bien à elle. J’en sais quelque chose.
Enfant, j’ai été témoin d’actes de violence. C’est à partir de ce modèle que j’ai appris à communiquer dans un mariage, et c’est la raison pour laquelle j’ai accepté les mauvais traitements de mon conjoint. Souvent, mon mari prenait des décisions d’ordre financier sans me consulter. Chaque fois que nous arrivions à économiser de l’argent, il s’en servait pour assouvir une autre de ses envies impulsives. Il prenait ma carte bancaire sans me le demander et faisait fondre ma marge de crédit. Cette situation entraînait de nombreuses disputes. Quand j’ai compris que cela faisait peur aux enfants, j’ai cessé d’argumenter. Mon amour-propre était en chute libre, j’ai pris beaucoup de poids et je n’avais personne à qui parler. Il m’était extrêmement difficile de trouver le courage de m’en aller, mais la relation était impossible à vivre.
Ma famille a critiqué ma décision de quitter mon mari et de renoncer à ce qu’elle considérait comme une bonne sécurité financière, d’autant plus que j’avais appris que j’attendais des jumeaux.
Donc j’étais enceinte, j’avais entrepris des procédures de divorce et j’étais sur le point de devenir monoparentale. Ce n’était pas comme ça que j’avais imaginé ma vie. Mais à l’intérieur de moi, je sentais revenir ma soif d’autonomie et mes forces. J’ai même ressorti un projet d’entreprise que j’avais élaboré antérieurement.
Nés prématurément, mes jumeaux ont dû rester deux mois à l’hôpital. Une fois arrivés à la maison, ils ont nécessité des soins constants, et je savais que je n’aurais pas la capacité de m’occuper en même temps d’une entreprise. J’avais l’impression d’être sur le point de tout abandonner. C’était une période très difficile pour moi sur les plans mental, émotionnel et financier. Je me sentais prise au piège.
Quand j’ai appris que j’avais été acceptée dans le programme Microskills, j’ai éclaté en sanglots. Le programme était exactement ce dont j’avais besoin. Il m’a permis de renforcer mon sentiment d’estime de soi et mon sentiment d’autonomie, et de retomber sur mes pieds. J’ai préparé un plan d’affaires solide que j’ai présenté à un panel de professionnels qui m’ont donné d’excellents conseils. J’ai travaillé individuellement avec une accompagnatrice très inspirante. Après avoir terminé le programme, j’ai soumis des rapports périodiques. Mon statut de travailleuse autonome m’a procuré la liberté dont j’avais besoin pour guérir tout en faisant ce que j’adorais. Puis, grâce aux connaissances et aux compétences que j’avais acquises dans le secteur privé, j’ai pu lancer un service de développement d’entreprise pour les femmes entrepreneures, qui s’occupe surtout de planification d’entreprise et de marketing.
Un grand nombre de femmes, notamment celles qui vivent avec un faible revenu, croient que le travail autonome est hors de leur portée parce qu’il nécessite un important investissement de départ. Mais je leur enseigne les techniques qui ont fonctionné pour moi. Lorsqu’elles s’écrient « Ah-ah! » et qu’elles comprennent comment ça peut fonctionner pour elles aussi, cela me rend vraiment heureuse.
Ce n’est pas facile. Mais ma passion est de travailler avec des femmes entrepreneures afin de valider et de consolider leur pouvoir et leurs choix. Et quand ce type de passion brûle en vous, elle est là pour rester.
Le programme Women’s Opportunities in Business, Trades and Technology, offert par le MicroSkills Community Development Centre, a reçu un financement de la Fondation canadienne des femmes.